Les imbéciles adorent rirent des gens qui en savent moins qu’eux. C’est pourquoi j’ai toujours le sourire aux lèvres en pensant à mes années collège et à toutes les bêtises que sortaient mes camarades de classe à l’époque où wikipedia n’existait pas. Glorieux souvenir que ce cours d’arts plastiques où la petite Kadjatou, 17 ans et demi, toujours en troisième, s’échinait à dessiner un Koala, exercice donné par notre excentrique ma?tresse de dessin (le Bondynois dit ma?tresse jusqu’à la fac). Avec mes trois ronds couchés sur le papier, j’ai eu 16/20. C’est pour vous dire un peu le niveau artistique demandé.
La prof de coloriage n’était pas très regardante sur notre génie créatif, sinon elle nous aurait fait dessiner autre chose que des koalas. A croire qu’elle savait notre coup de crayon beaucoup plus efficace sur un bulletin de notes falsifié que sur une feuille de dessin format A4. Devant la toile de Kadjatou – une ?uvre d’art de président, tellement c’était grandiose –, la prof a néanmoins explosé : ? Qu’est ce que c’est que ?a ! Je te demande de me dessiner un koala, il faut bien souligner les rondeurs ; là ; je ne vois qu’un rectangle bleu avec trois yeux. ?
Vrai que son koala ne ressemblait à rien de concret, il m’a violé les yeux tant il était moche. Une zèbre qui aurait fait l’amour à un meuble de jardin Leroy Merlin aurait pu accoucher du dessin de Kadjatou. Caca, nul, sale, 2. Mais en bons camarades, nous l’avons quand même soutenue : ? Koala za?rois !! ?, ? Ton Koala il a faim ! ?, ? Robot koala !! ? ? T’as dessiné ta mère !! Ta mère le koala rectangulaire !! ?, hurlèrent mes camarades hilares à la vue de cette monstruosité d’aquarelle.
Réponse de Kadjatou : ? Attendez, je ne suis pas peintre, moi ! Je suis pas Mozart ! ? Depuis que je l’a connais, elle a toujours eu un problème avec Mozart, Kadjatou. En contr?le de musique, le génial compositeur devenait sous sa plume César, puis réapparaissait en cours d’histoire, pour conquérir la Gaule…
Des exemples comme celui-là, j’en ai un millier comme tout ceux, je suppose, qui ont gardé un bon souvenir de leurs années d’études. L’histoire du jeune Bruno, un autre de mes camarades de collège, qui au moment des faits, s’attend depuis deux semaines à avoir la note maximal pout sa composition de fran?ais intitulé ? Racontez un récit, si possible historique, qui se déroule au moyen age et qui célèbre la chevalerie ?. Son optimisme fut terriblement dé?u. A l’heure de la remise des copies, il se met à insulter le prof pour son 02/20.
? Lis ta copie a tes camarades, Bruno ?, lui demande calmement et gentiment notre enseignant. ? Ouais ! Ils seront mes juges ! ?, répond Bruno avec véhémence avant d’entamer son fabuleux récit : ? Le chevalier Gotrand à l’armure étincelante parcourait la verte contrée, son épée de feu à la main. Soudain une soucoupe volante à réaction nucléaire débarque du ciel et lui coupe la route. Il affronta les troupes impériales munis de rayons lasers avec bravoure et chevalerie (…) et après son retour vers le futur il se maria sur Mars avec la princesse Zantor. ?
Dans la classe rire général et explications du prof se succèdent : ? Sans la vulgarité des passages pornographiques où des extraterrestres aux cinq poitrines copulent lubriquement, tu aurais pu avoir trois point de plus, même si le résultat aurait été toujours hors sujet. J’avais bien expliqué les règles du récit médiéval… ?
Mais la palme d’or du n’importe quoi date de ma rentrée en seconde. On commence par un cours de fran?ais, avec une prof stagiaire, assez canon, qui a deux ans de plus que le plus agé d’entre nous. Elle débarque, la pauvre, du fin fond d’un IUFM de la Bretagne armoricaine. Elle commence le cours en nous mettant grave la pression : lecture de ? L’Avare ?. ? Le Molière à sa mère ?, entendis-je chuchoter, avant que le cancre de service ne s’y colle à l‘oral.
? Harpagon est un pingre… Madame, c’est quoi un pingre ? ?, demande t-il. ? Un pingre c’est un avare répond la jolie professeure. – Ah ok, merci ?, rétorque mon camarade. Il continue sa lecture mais s’arrête dans sa lancée au bout de quelques secondes : ? Mais, madame, c’est quoi un avare ? – Oh mais ce n’est pas sérieux, ?a, de pas savoir ?a en seconde ! Un avare, c’est quelqu’un qui est près de ses sous, qui ne veut rien dépenser. ? Tout content d’avoir enfin capté, cet élève lui lance : ? Ah ! J’ai compris ! Un juif ! ?
Il sort ?a normal. Avec une troublante na?veté et la fierté d’avoir trouvé à son sens le synonyme le plus adéquat qui sied au mot avare : juif. Bien s?r, face à cette connerie, rire emballé dans la classe. La prof ne se démonte pas : ? Mais ce n’est pas des choses à dire, ?a, jeune homme ! Tiens, d’ailleurs, pourquoi on dit que les juifs sont avares ? Vous savez d’où ca vient ? ?
Un mec au fond de la classe répond à peu près ceci : ? C’est parce que c’est des crevards ! Ils ne lachent rien ! Ni la Palestine ni les pizzas ! Hein, pas vrai Samuel ? dit-il, invectivant son voisin juif, ?a fait deux mois que tu me dois une pizza 4 fromages et tu ne veux pas la sortir de ta poche, sale vieux rat du marché. ? Le Samuel en question rétorque un truc du genre : ? Je lache rien. C’est toi la pince monroyal (ndlr : un crevard plus fort que la pince monseigneur.) Je travaille dans une pizzéria, ?a veut ne pas dire que je les gratte à l’?il ! Paye la, ta pizza, si tu veux bouffer ! ?
Après cet échange, deux ou trois personnes y sont allé de leurs anecdotes de crevardise avec un fils de Judée Samarie. Il y en a un, il m’a posé une question, et si je répondais par une autre question, eh bien, j’étais juif. ? C’est comme ?a qu’on les reconna?t, madame ! ?, il disait. Face à cette rentrée un peu IIIe Reich, la prof sidérée commence à perdre pied. C’est qu’on a vite fait le tour du cliché avec les chalalas, les autres peuples doivent manger un peu leur part aussi, maintenant que les tribuns de la classe sont sur leur lancée. C’est dans la logique des choses : dans l’histoire de l’humanité, ce sont souvent les juifs qui trinquent avant les autres.
Idir Hocini
montre corum
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